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Histoire loufoque


De Impétueux, le 1er janvier 2016 à 19:41
Note du film : 3/6

Loufoque, lunaire, poétique, original, tendre et gentil, j'admets bien volontiers tous les qualificatifs qu'on a donnés à L'étrange désir de M. Bard. Sûrement dix minutes ou un quart d'heure de trop, comme souvent mais la patte habile de René Barjavel, romancier de grande imagination mais aussi homme-protée du cinéma français des années 50 (les Don Camillo, Les chiffonniers d'Emmaüs, L'homme à l'imperméable, Le cas du Docteur Laurent et bien d'autres films adaptés ou dialogués).

Mais gentil précisément, peut-être un peu trop. Et c'est la limite de ce genre. Comment expliquer cela ? En disant tout simplement que les films d'émotion, où de braves gens connaissent les vicissitudes de la vie, ses chagrins et même ses drames devraient pouvoir rester intacts des réalités sordides. Lorsque vous regardez Les quatre filles du docteur March, Goodbye Mr. Chips ou Le château de ma mère, où, au milieu de paysages tendres, la mort frappe à un moment donné certains des personnages, vous vous devez d'être ému devant la douceur et la tristesse de l'existence. Mais dans ces films là, hormis la Fatalité, il n'y a rien qui vienne troubler la douceur des affections.

Mais prenez L'étrange désir de M. Bard et vous avez au moins deux sujets poignants : la laideur physique et la rapacité familiale. Et le film de Géza von Radványi les traite par dessous la jambe alors qu'ils sont bien plus intéressants que tout le reste.

La laideur physique, qui fait reculer les filles et qui a empêché Auguste Bard (Michel Simon) de jamais nouer la moindre intrigue, de conter la moindre fleurette. Voilà un thème qui n'a pas vraiment pas très souvent abordé au cinéma et qui est pourtant si évident dans les relations humaines. Si l'on fait exception des infirmités et monstruosités à la Elephant man, je ne vois guère qu'Adhémar qui ait eu une toute petite orientation (vite abandonnée dans le courant du film) pour évoquer ce drame de ceux qui révulsent leurs semblables. Difficulté de trouver des acteurs vraiment laids ? Va savoir ! Comment ne s'est-on que rarement servi du visage particulier de Daniel Emilfork pour essayer de représenter la tristesse des laissés pour compte ?

La rapacité familiale est un peu mieux servie. Je recommande à qui ne les ont pas vus les excellents Meurtres de Richard Pottier, avec un Fernandel admirable, mais aussi le meilleur film de Christian-Jaque, Un revenant, avec un Louis Jouvet au plus haut. Et il y a bien d'autres histoires de famille gluantes.

Radvanyi a ce joli matériau sous la main : un immense acteur très laid, Michel Simon et autour de lui d'excellents comparses, menés par un excellent Henri Crémieux et un Louis de Funès plus maîtrisé que de coutume, tout prêts à lui mettre la tête sous l'eau. Il dispose même d'une Geneviève Page que sa beauté ambiguë et sa voix grave peuvent facilement incliner vers les pires turpitudes et trahisons. Voilà qui pourrait confectionner un drame bien intéressant.

N'en demeurera qu'une comédie sympathique et insignifiante, un peu niaise sur la fin, lorsque la larmichette surgit, le brave millionnaire cardiaque Auguste s'éteignant au moment même où naît son enfant, ce qui va permettre à la maman (Geneviève Page, donc) de refaire sa vie, nonobstant le marmot, avec un garçon de son âge. Tout cela n'étant pas explicite mais évident.

Émotion, quand tu nous tiens !


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De Gilou40, le 9 août 2011 à 01:12
Note du film : 4/6

Lorsqu'il s'agissait d'interpréter un rôle conforme à son physique hideux, Michel Simon ne reculait décidément devant rien.

Cette réflexion de David-H me fait penser à ce que disait Gabin à un jeunot, parlant de son aventure avec Bardot dans En cas de malheur : "- J'aurais préféré avoir une autre gueule que celle là pour vivre ce qui m'arrive, mais le plus extraordinaire, c'est que ça m'arrive avec cette gueule là !! -" Imaginez un instant que Michel Simon fut beau…Quelle horreur ! Quel Drôle de drame pour le cinéma français..

Géza von Radványi, connait pas. Mais c'est joli…Une belle surprise que cet Étrange désir de Monsieur Bard ! C'est plein de tendresse, de douceur, d'enfants… Après une entrée en matière, c'est vrai, assez cul-cul voire carrément inutile, nous entrons dans le vif du sujet avec un Michel Simon se sachant condamné par la médecine et voulant à toutes forces avoir un enfant. Et ce qui aurait pu, avec un autre acteur, être un larmoiement d'une heure trente se transforme en un espèce de conte de fée assez fou pour plaire à Cocteau. Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais dans l'excellent film de Jugnot, Une époque formidable, on voit Ticky Holgado agresser une standardiste à l'hôpital, essayant de l'embrasser de force. Elle se débat et lui crie :"- Vous êtes fou !!-" Et, la relâchant, il lui lance :"-Mais c'est vous qui êtes normale !-" Et bien L'Étrange désir de Monsieur Bard, c'est tout à fait ça ! C'est l'histoire d'un homme un peu fou, ivre de tendresse, en face de gens beaucoup trop normaux… Le "loufoque" réside dans le fait que cet homme vit pleinement l'attente de sa prochaine progéniture, à qui il trace un avenir à l'abri de tout, sans se soucier de nos petites angoisses et de nos questions sans intérêt pour lui. Monsieur Barjavel, que je connais fort peu, écrit bien joliment les choses. Mais c'est vrai qu'il y a du Cocteau dans cette écriture là.


Toute la partie en Italie, à la recherche de beaux visages d'anges qui inspireront la future maman, afin que son bébé soit plus beau que son papa, le poète aurait pu l'inventer… Quel dommage que le destin fasse si bien son sale boulot ! Jamais décevant ce salaud là… Mais quelle jolie fin. Un cœur qui s'arrête de battre pendant que la voix d'un nouveau-né se fait entendre. Je ne cacherai pas que la larmichette jouait au funambule sur le Mascara…

Michel Simon, encore et toujours ! Sachant tout faire et capable de tout. Toujours émouvant dans son entêtement à vouloir un enfant qui n'aura pas de père, mais jamais pathétique. Entourant la douce Geneviève Page d'un océan de compréhension. On en arrive à se dire qu'il forme un beau couple…Quelle leçon de comédie, encore une fois ! Prenez vous ça dans la tronche ! On voit Paul Frankeur, pour une fois en curé (!) qui l'observe…Il y a une admiration dans son œil. Deniau, le meilleur ami, le suit à la trace et, chez lui aussi, le trouble s'installe. Quelle présence que ce menhir du cinéma ! Et le petit De Funès, sorti de l'œuf, tente de s'énerver derrière la légende…

Ce film m'a touché au cœur. Ni Duvivier, ni Ozu. Juste une belle histoire…Il en faut. Un petit message comme venu du ciel, afin d'oublier deux secondes que nous sommes souvent un peut trop "normaux". La rengaine du film nous chante : "- Sur le pont d'Avignon, on y danse , on y danse tous en rond…-". Pas tous, non. Pas tous…


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