Mais, passée cette forme rebutante, s'ouvre un voyage dans un pays méconnu même s'il ne cesse de s'ouvrir, la Russie d'aujourd'hui dans ses contradictions, dans ses violences et dans ses dérives. Voyage humain aussi, voire surtout, dans un troublant jeu de chassés-croisés d'histoires qui s'éloignent, se croisent avant de se rejoindre, racontées par des points de vue qui sont autant de personnages forts de leur personnalités et de leurs contradictions.
L'histoire est celle d'une histoire qui se mord la queue. Emmanuel Carrère avait déjà tourné un documentaire en Russie pour Envoyé Spécial sur un prisonnier de guerre. Il y avait rencontré Ania, une jeune femme qui voulait épouser un ex du KGB. L'idée naît de faire un documentaire sur elle. Il y retourne quelques mois plus tard, filme, mais rien de passionnant. Voilà qu'il apprend qu'Ania et son fils ont été tué par un fou. Il décide de repartir pour enquêter.Il y a évidemment là un matériau passionnant, à la fois l'enquête que la découverte d'un pays fascinant et d'une ville en particulier : Kotelnitch. Mais le plus intéressant de ce documentaire réalisé par le journaliste écrivain Emmanuel Carrère, c'est le ton. On est dans une sorte de visite un peu ivre, et très nostalgique de la Russie, que la première scène résume parfaitement : on assiste dans le train qui les ramène en Russie à une discussion sur Ania. Ils sont ivres et évoquent leurs souvenirs de leur dernière visite. Le ton est donné.
La mise en scène du film est étonnante. Moins dans le cadre que dans la narration très personnelle, avec notamment une voix narrative de Carrère lui-même. Le montage est fin, et bien rythmé. Bref un film étrange mais réussi.
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