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D'Alice à Isis


De DelaNuit, le 6 mai 2016 à 17:39
Note du film : 4/6

Les amants du Nil : un petit film sans prétention, histoire d’amour et d’aventure onirique de 2001 qui a vite été oublié et qui m’apparait autrement plus sympathique que nombre de grands films mieux maitrisés. Tout commence dans la belle lumière dorée de l’Afrique du nord, alors encore française, pendant la seconde guerre mondiale. La jolie Anne (Emma de Caunes, d’une sensualité à tomber), rêveuse et secrète, fantasme sur le corps retrouvé d’un jeune militaire français (Eric Caravaca) : qui était-il ? Quelle mission secrète l’a conduit jusqu’ici, jusqu’à cette fin dramatique ? Il n’en faut pas davantage pour emballer l’esprit romanesque d’une jeune fille qui s’ennuie et rêve de belles histoires d’amour comme dans les films.

Sujette à des crises de narcolepsie, la voici bientôt inanimée, veillée par ses proches d’autant plus inquiets que les bombardements font rage. Mais son esprit est ailleurs… dans un autre lieu mais également un autre temps. Trois jours plus tôt, auprès de sa tante archéologue (la toujours savoureuse Bernadette Lafont), elle se trouve au Caire, dans un nid d’espion digne de Casablanca, une imagerie du septième sortie de La vallée des rois, où elle ne va pas tarder à rencontrer celui dont le fantôme la hante, juste avant son fatal départ. Attention, esprits cartésiens et réalistes abstenez-vous, c’est une Egypte ouvertement fantasmée et idéalisée qu’il s’agit. Un décor exotique de roman photo clairement annoncé par l’affiche signée Pierre et Gilles, portée par de somptueuses mélodies de Georges Delerue réutilisées avec bonheur et qu’il eut été dommage de laisser dormir.


Des figurants élégants ou interlopes évoluent dans les salons d’un grand hôtel ou dans la boutique de trafiquants d’antiquités, le soleil couchant nimbe les vestiges des pharaons et les le Nil éternel scintille sous le clair de lune. Timidement, les liens se tissent entre les deux jeunes gens, qui ne s’en emmêlent pas moins dans la toile de la fatalité. Notre Alice au pays des merveilles exotiques pourrait-elle infléchir le destin ou gagner avec son beau militaire l’ailleurs hors de l’espace et du temps rêvé par les amants tragiques ? (le fameux « Somewhere » chanté à la fin de West side story ?)

L’idée est touchante à condition de regarder le film avec son âme d’enfant ou de midinette. Le scénario et les personnages ne sont pas parfaitement maitrisés, on est loin des classiques du type Pandora, L’aventure de Mme Muir ou Peter Ibettson, dont on sent bien pourtant l’influence. La fin ouverte (auprès de l’avion, dernière allusion à Casablanca) en laissera certains frustrés mais permet de demeurer sur un plan où règne encore la diversité des possibles. Si la démarche, la quête onirique d’Anne prend tout son sens, c’est par sa mise en perspective avec la légende locale de la déesse Isis, racontée par Bernadette Lafont sans que sa nièce (et le spectateur, craignons-le) y prête pourtant une grande attention. Usant de sa magie pour rechercher le corps mutilé de son époux et frère défunt Osiris, et en en recollant les morceaux épars, la déesse lui assurait une vie éternelle dans l’au-delà d’où il allait désormais régner, offrant aux humains qui le rejoindraient ensuite « de l’autre côté » la perspective d’une suite, d’un ailleurs après la mort. Voilà pourquoi cette histoire ne pouvait se dérouler qu’en Egypte… Dans la recherche de l’homme aimé, la volonté de recoller les morceaux épars de sa personnalité et de son histoire, Anne suit une démarche similaire afin de le garder vivant de l’autre côté du miroir… Mais il s’agit de magie bien-sûr (en l’occurrence ici, celle du cinéma). Encore faut-il y être sensible, ce qui est une autre histoire.

Pour les amateurs : les musiques de Delerue utilisées dans le film sont tirées des films : Rich and famous, Her alibi, Exposed. On les trouve en CD notamment sous le titre « The London sessions ».On entend aussi « Il ne faut pas briser un rêve », un des standard de la chanson française des années 40…


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