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Les humeurs de la mer


De Impétueux, le 27 mars 2014 à 19:31
Note du film : 4/6

Il est bien certain que si Jean Vigo n'était pas mort prématurément (à 29 ans) après avoir donné la merveilleuse Atalante, À propos de Nice, ce court métrage qui est sa première réalisation (à 24 ans) ne serait pas édité dans le beau coffret DVD paru il y a quelques années. Est-ce que Nogent, Eldorado du dimanche, qui présente certaines analogies, et qui est le premier film de Marcel Carné a eu l'honneur d'une édition ?

Pour autant, le film, quelquefois un peu maladroit, qui ressemble souvent à l'exercice de style de fin de classe terminale d'un élève brillant a de grandes qualités formelles et séduira tous ceux qui s'intéressent à la période où le muet, qui a sans doute épuisé toute sa force vitale et tourne en rond, va céder la place au parlant qui va ouvrir au cinéma des champs infiniment plus vastes que ceux dans quoi il s'était, par force, confiné.

Du muet, et des provocations surréalistes, À propos de Nice a beaucoup des mauvais tics : la gesticulation de la caméra, qui filme en basculant, en se trémoussant, vestige du temps où les séquences animées surprenaient le public en le déconcertant gratuitement ; les juxtapositions d'images, truc de prestidigitateur où une jeune femme assise est dépouillée de ses vêtements par un regard de désir et apparaît nue en un clin d’œil, ou la chaussure cirée qui laisse la place à un pied déchaussé, ou encore le quidam qui se dore au brûlant soleil et qui se transforme en nègre Banania. Mais du muet, Vigo a conservé le soin, la recherche, l'inventivité dans la composition, l'architecture esthétique, l'éclairage, le soin donné aux ombres et lumières. La qualité géométrique de À propos de Nice est exemplaire.

Il y a aussi, ce qui est à la fois niais et attendrissant, un bout de pamphlet politique dans le film. Jean Vigo était le fils du militant anarchiste et pacifiste Almereyda, suicidé pendant la Grande guerre et il en portait les idéaux ; il y a donc, d'une façon un peu simpliste, une volonté d'opposer la grande foule des nantis qui paradent sur la promenade des Anglais, en ombrelles et chapeaux-cloche, en gilets pansus et en moustaches arrogantes des images de misère et de travail ; et plus puérilement encore d'alterner des images de bacchantes déchaînées prises pendant le carnaval de Nice et la foule grave qui suit un corbillard.

Mais c'est tout de même plein d'idée, d'enthousiasme et de dynamisme. On ne saura jamais ce qu'après ce beau chef-d’œuvre qu'est L'Atalante Vigo aurait pu apporter au cinéma.


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