Je ne suis pas en train d'écrire que le film de Jason Reitman est, comme on dit Outre-Atlantique, pro life, c'est-à-dire fondamentalement opposé à l'avortement. C'est bien plus compliqué et intelligent que ça, au contraire de ce que cherchent à nous faire accroire les pro choice, qui considèrent que le fœtus n'est rien du tout qu'une métastase gênante, dont on peut et on doit se débarrasser au plus vite.
La jeune fille sait bien qu'à seize ans il lui sera bien difficile d'être mère ; elle songe donc à laisser son bébé aux mains d'un couple infertile qui l'aimera, l'élèvera, le conduira au meilleur. Après consultation de petites annonces, elle choisit Mark (Jason Bateman) et Vanessa Loring (Jennifer Garner), sorte de couple idéalisé, apparemment très aimant et en tout cas très aisé. Drôle de pays que les États-Unis où les adoptions peuvent ainsi se traiter, s'organiser, se monnayer. Naturellement ce n'est pas si simple ; parce qu'un petit être qui grandit dans un ventre qui grossit chaque jour un peu plus, voilà qui change les points de vue sur la vie, les gens, les choses… Et que le regard des autres est changé sur soi. Voilà que Mark est pris au piège de la jeunesse, de l'excentricité de Juno. Ou qu'il découvre simplement avec elle qu'il en a marre de sa vie lisse, tranquille, ennuyeuse avec Vanessa.Et voilà. C'est tout bête, une histoire qui ne va pas bien loin, mais qui n'est pas si loin de la réalité. Rien de classique, rien d'invraisemblable rien de mystérieux. Ce qu'on peut simplement savoir des bizarreries de l'existence.
En tout cas, j'ai bien aimé. Comme des tas de gens et de critiques. Pour une fois.
Petit film indépendant, visuellement soigné, et écrit avec un vrai sens de l'excentrique, Juno porte un message quelque peu confus sur l'avortement, et se refuse à confronter ses personnages au moindre conflit grave : les parents de l'ado enceinte sont incroyablement tolérants et compréhensifs, le couple en difficulté se sépare sans psychodrame, les réconciliations se font en douceur. Bref, le monde de Juno est doux et amical, et il fait bon y vivre, malgré quelques petits coups de mélancolie.
Le film doit beaucoup à la surdouée Ellen Page, révélation de Hard candy, qui fait preuve d'un aplomb inouï, et un trio de vétérans des séries télé apporte un soutien formidable : J.K. Simmons (Oz) en père plus que cool, Allison Janney (A la Maison Blanche) en belle-mère fonceuse et Jennifer Garner (Alias) se sort bien d'un rôle ingrat mais émouvant. Juno est une gentille comédie farfelue, tendre, qui se suit avec plaisir, même s'il ne laisse guère de souvenir très marquant.
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