Institutrice retraitée, Dora (Fernanda Montenegro), pour arrondir des fins de mois parcimonieuses, s'est établie écrivain public, avec un petit éventaire qu'elle tient à la Gare centrale de Rio. De braves gens illettrés, de tout âge, sexe et race viennent lui demander de rédiger pour quelques sous missives familiales, amoureuses, pratiques, documentaires. Sous la lumière terne d'un grand bâtiment sans charme ni qualité, c'est le grouillement habituel des centres de communication où l'on ne quitte les trains que pour s'engouffrer dans les métros et vice-versa.
Dora n'est pas une femme bien agréable : sèche, dure, égoïste, plutôt moche. Sa volupté est de conserver les lettres qu'elle écrit au lieu de les mettre à la poste et d'en discuter avec son amie Irène (Marilia Pera), qui doit avoir – mais ce n'est pas explicite – la faveur facile et la cuisse légère. Les deux femmes, au soir, font un sort aux enveloppes, les déchirant ou les enfouissant dans le grand tiroir d'un bahut. Méchanceté ? Plutôt indifférence complète à l'autre. Fortuitement, Ana (Soia Lira), une des clientes de Dora, séparée de son mari ivrogne, mais aimé, qui vit dans le Sertao est écrasée par un autobus ; son petit garçon Josué (Vinicius De Oliveira) se trouve presque par hasard recueilli par Dora qui ne cesse de maugréer contre cette charge. Elle le place même chez un couple d'aigrefins qui prétend proposer à des riches Étasuniens des jeunes enfants à adopter, mais qui se livre en fait peut-être au trafic d'organes. Poussée par son amie Irène et saisie de remords, elle vient le rechercher. Et les deux partent à la recherche du père. Là commence une sorte de road-movie triste à la poursuite d'un homme insaisissable, Jesus, le père de Josué et marqué par de nombreuses rencontres et mésaventures qui ont l'immense mérite de rendre un son vrai et peu à peu de rapprocher la vieille femme morose et le gamin écorché vif. La fin du film est tout à fait parfaite, ne sombre ni dans un happy end qui serait singulièrement malvenu, ni dans une dramaturgie qui serait excessive. On n'est pas obligé de retenir son émotion, d'ailleurs.Pays déconcertant où cohabitent, coexistent (et sans doute souvent se recouvrent) violence criminelle et religiosité exacerbée, à la limite du paganisme. Terres sèches, masures à perte de vue, impression de déglingue générale. On ne voit pas comment le Brésil pourrait s'en sortir.
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