Forum - The Ghost Writer - Où est le Polanski d'antan ?
Accueil
Forum : The Ghost Writer

Sujet : Où est le Polanski d'antan ?


De Impétueux, le 23 février 2010 à 16:26
Note du film : 3/6

note de 3 est une note d'humeur, sûrement inférieure à ce qu'elle serait si le réalisateur de The ghost writer n'était pas Roman Polanski qui tourna, il y a quarante ans et davantage, certains des films les plus angoissants qui se puissent.

The ghost writer est une sorte de broderie en forme de thriller sur les destinées d'un ancien ministre britannique, Adam Lang (Pierce Brosnan), dont les traits communs avec Tony Blair sont l'évidence même.

L'étrange atmosphère qui entoure Adam Lang, qui entoure, d'ailleurs ceux qui, après avoir détenu d'énormes pouvoirs apparents se voient, par le jeu de l'opinion volage et du désamour des électeurs, ou par des règles institutionnelles aussi contraignantes qu'absurdes rejetés hors des affaires du monde est le meilleur du film. En voyant Lang/Blair, on songe à Giscard, à Schröder, à Clinton qui, encore fort jeunes se sont trouvés à la fois éloignés définitivement de la direction de ce qui avait jusque là conduit leur vie et leur ambition, et détenteurs de souvenirs, de secrets, d'expériences extraordinaires.

Qu'un tel personnage, entouré de sa petite cour de pasionarias énamourées, de serviteurs zélés, d'avocats efficaces, de gardes du corps patibulaires écrive ses mémoires est la loi du genre ; et qu'il se fasse assister par un spécialiste de la chose, un nègre littéraire est également habituel.

Le décor est donc bien posé ; le nègre, Ewan McGregor, flanqué d'un caricatural agent (Jon Bernthal) est choisi avec cette délicieuse brutalité qui parait être la marque des éditeurs anglo-saxons ; il débarque, en plein hiver, dans une île de Nouvelle-Angleterre qui me semble être (avec l'affreux Afghanistan) une des terres les plus inhospitalières et ennuyeuses qui se puissent au monde et qui est pourtant censée être quelque chose comme Martha's Vineyard, la résidence d'été de la bonne société de la Côte Est ; c'est désolé, plein de pluie, venteux, enquiquinant comme tout d'apparence. Le premier jet des mémoires de l'ancien Premier ministre est protégé comme l'or de Fort Knox (memento Goldfinger !) et l'écrivailleur va se mettre au travail.

Dans beaucoup de films du Polanski de la grande époque, il y a, à un moment donné, dans l'ordre apparent des choses, souvent tranquille, serein, même, une sorte de fissure qui survient, qui s'élargit de plus en plus en fracture et qui rend le récit de plus en plus insoutenable ; c'est le cas du Couteau dans l'eau, de Répulsion, bien sûr, de Cul-de-sac, de Rosemary's baby, de Frantic, par exemple. C'est souvent une des raisons de la force de ces films, la montée chromatique, l'apparition d'un nuage dans un ciel bleu.

Dans The ghost writer le nuage est là d'emblée, puisque le film commence par la découverte, sur la plage désolée, du corps noyé du confident de l'ancien Premier ministre, son premier nègre désigné, qu'Ewan McGregor va donc remplacer. On sait donc d'emblée qu'un lourd secret pèse sur beaucoup de gens, que la place du nègre est dangereuse, et qu'il va se sortir brillamment de l'épreuve (enfin…presque). Voilà qui donne moins de sel au film, ravalé à un récit efficace, bien fichu, finalement assez prévisible, jusqu'à la révélation finale, qui est d'une très grande innocuité à mes yeux, et qui n'a rien d'étonnant ou d'excitant.

Acteurs de qualité  – même si je n'arrive pas à imaginer Pierce Brosnan dans un autre rôle que le médiocre James Bond qu'il fut – avec deux mentions spéciales : le joli clin d'œil donné par Polanski à Eli Wallach, qui conserve, à près de 95 ans (eh oui ! je n'en crois pas mes yeux ! il est de 1915 !!!) une capacité d'étrangeté physique extraordinaire, et la finesse de jeu d'Olivia Williams, qui interprète Ruth, la femme du Premier ministre, capable d'être en quelques tournures, insignifiante, acariâtre, puis très séduisante… jolie performance d'actrice…


Répondre

De droudrou, le 27 février 2010 à 17:09

Super cette avant-première dont nous gratifie notre ami Impétueux : le film sortira le 3 mars prochain !… Comme c'est le genre de sujet que j'affectionne je suis très curieux de découvrir sauf que par exemple dans ce coin de la France Profonde aucun cinéma à moins de 85 km ne nous propose pour l'instant Shutter Island je m'interroge de savoir si pour la saint Glinglin qui tombe tous les 10 ans le 31 février il sera programmé !


Répondre

De Arca1943, le 5 août 2010 à 02:33
Note du film : 4/6

Je ne bouderai pas mon plaisir, mais comme pour Frantic et La Neuvième porte, je suis resté un peu sur ma faim. En 1962, quand triomphaient les logorrhées verbales de la Nouvelle Vague, Roman Polanski versait à son scénariste du Couteau dans l'eau, Jerzy Skolimowski, un bonus en argent à chaque fois qu'il réussissait à couper un mot du dialogue. Souci d'être efficace et compact : et dès ce premier film, il était un maître du suspense. Le Couteau dans l'eau, vu à la Cinémathèque, ça m'avait marqué. Mais ça marchait d'abord et avant tout grâce à un sens aigu de la création d'atmosphère – et là, on sentait à plein sa touche personnelle – et mieux encore quand on arrive à Répulsion, Rosemary's Baby… Or, pour Frantic, La Neuvième porte et maintenant The Ghost Writer, c'est justement ça qui n'est pas pleinement au rendez-vous selon moi. La réalisation est évidemment très compétente, mais reste à mes yeux un peu impersonnelle, comme si Polanski hésitait à prendre des risques, ou à s'attarder, à prendre un peu plus son temps. Mais c'est peut-être le cinéma en général qui a changé ?

Cela dit, c'est très bien, très divertissant. D'abord, c'est un film d'acteurs. Pierce Brosnan est un choix très heureux pour l'ex-PM britannique, et que dire de la mercuriale Olivia Williams dans le rôle de sa femme. Les seconds rôles sont super, et au premier chef bien sûr le moment magique où apparaît le toujours énergique Eli Wallach. Mais je compte aussi James Belushi, amusant dans son rôle d'éditeur, le solide Timothy Hutton même s'il a peu à faire, et bien sûr le suave Tom Wilkinson.

C'est une bonne histoire à suspense, en somme tout à fait classique, racontée très efficacement, dans un étrange et magnifique décor balayé par les embruns. Mais voilà, j'attendais mieux, je plaçais la barre plus haut…


Répondre

De vincentp, le 19 novembre 2011 à 23:44
Note du film : 5/6

Un excellent film contemporain, très réussi dans toutes ses composantes, à mon avis. J'ai été très surpris positivement, et ne retrouve pas du tout les réserves exprimées par Arca, Impétueux, et Alholg. Polanski sait créer des ambiances oppressantes et conter des histoires qui tiennent la route, grâce à son grand talent de metteur en scène. Seules les trois dernières minutes, se voulant spectaculaires, n'étaient pas nécessaires. Un divertissement prenant et une source de réflexion sur l'exercice de la politique. Si tous les films qui sortent en salle actuellement étaient de cette qualité !

Le Couteau dans l'eau : un des meilleurs films que j'ai vus cette année, et je suis assez d'accord avec Arca. Mais le cinéma a changé et Polanski s'est adapté.


Répondre

De Arca1943, le 21 novembre 2011 à 01:50
Note du film : 4/6

« je suis assez d'accord avec Arca. Mais le cinéma a changé et Polanski s'est adapté. »

Ce n'est pas ce que je veux dire. C'est que comme pour Frantic et La Neuvième porte, je mets la barre haute pour The Ghost Writer parce que c'est un film à suspense par un réputé maître de la peur. Or, côté tension, côté suspense, ça fonctionne, bien sûr, mais ça ne m'angoisse pas tant que ça. Frantic m'avait franchement un peu déçu tandis que ce Ghost Writer reste un très bon film, toutefois mes réserves se ressemblent : il y a certes du suspense, du mystère mais ça n'atteint jamais le haut degré de tension dont le réalisateur s'est montré capable dans d'autres films. Si par "le cinéma a changé", on entend qu'il est devenu moins efficace, alors d'accord…


Répondre

De vincentp, le 21 novembre 2011 à 20:23
Note du film : 5/6

Hum… Effectivement, The ghost writer ressemble à Frantic mais c'est un compliment. Ces deux films ont un point commun : une fin un peu décevante, par rapport ce qui a précédé. Polanski sait toujours bâtir des ambiances décalées, créer des personnages troubles, et construire un récit (les plans successifs permettent de bâtir des séquences très réussies). Une belle photo en plus. C'est déjà beaucoup. Il peut manquer peut-être un peu d'ambition, mais le cinéaste est âgé, et préfère sans doute assurer le coup.


Répondre

Installez Firefox
Accueil - Version bas débit

Page générée en 0.0051 s. - 5 requêtes effectuées

Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter